Mon cerveau est troué de mots de
poèmes
Qui passent et s'enfuient
Sans que je les attrape
Mon discours s'effiloche
Tel un jappement de chien perdu
Mes cheveux s'envolent
Pour construire le nid des étourneaux
Je ne finirai pas
Dans un médaillon baroque
J'épouserai les flammèches du vent
……………………………………………..
FRANC BARDOU
Pè-descauç
subre la tèrra
Qu’i
trepèron los aujòls,
Pasti la
fanga mairala
De las
sòlas, lo pas lis.
Lo
florilègi erbagiu
Abraça
cada encambada
Dins las auras
sentidosas
Que
m’alisan de matin.
Lo solelh
naissent recalfa
Lo pitre e
lo còr amassa
E la luna,
per l’esquina
Me passa
una man d’amiga.
Abraci las
nívols candas
Que
dessenhan lo camin,
Entre las
sèrras ventosas
Que me tenon
contra’l si.
Mas mans
alisan las plantas,
Las ruscas
e los aucèls,
Segon
l’aflat de la gràcia
Dels
encontres imprevistes.
Ma cara
beu la lutz saura
Que me
penchena d’esmai,
Davant
l’estranha evidéncia
De
l’indicibla beutat.
|
Pieds nus
sur cette vieille terre
Où
marchaient déjà les anciens,
Je pétris
la boue maternelle
De la
plante, le pas léger.
Le feu
follet des herbes tendres
Accueille,
heureux, chaque enjambée
Dans les
brises pleines d’odeurs
Qui me
caressent de matin.
Le soleil revenu
réchauffe
La
poitrine et le cœur ensemble,
Et la
lune, fidèle amie,
Me passe
la main dans le dos.
J’embrasse
les nuées candides
Qui me
dessinent le chemin,
Entre les
collines venteuses
Me
pressant tout contre leur cœur.
Mes mains
caressent chaque fleur,
Les
écorces et les oiseaux,
Selon tous
les grés de la grâce
Et des
rencontres imprévues.
Mon visage
boit la lumière
Qui me
caresse d’émotions,
Devant
cette évidence étrange :
Devant
l’indicible beauté.
|
|
|
|
|
Ce texte est issu du recueil Lo Dîvan de Ma
Sobeirana,
Le Dîvân de ma Souveraine, paru chez TròbaVox en 2019.
………………………………
PIERRE MAUBÉ
Le ciel est un œil qui pense,
les nuages sont ses larmes.
Quand tu regardes le ciel,
ses nuages traversent ton œil.
Quand une larme traverse le ciel,
une pensée naît dans ton œil,
et vient pleurer sur la terre.
…..
Ce sera un automne
de paupières entr’ouvertes,
de souvenirs affectueux,
de lassitude tiède,
un automne de parfums fragiles,
de feuilles finissantes,
d’espérances assoupies,
une saison à rêve fendre,
à cueillir les baisers du vent
pour venir les déposer
aux lisières
de ta bouche dérobée.
........................................
DIDIER METENIER
virus A
symptomatique
assez A
ctif
et hyper con
tagieux
qui nous con
fine...
un conard de virus
ce coronavirus !!!
…………………………………………………….
FRANCIS PORNON
2
Après-midi
Axe équidistant entre les lourdes nuits
Où s’écartent les hémisphères du jour
Temps sacré de la sieste
Séjour d’ombre quand se déchaîne la rage du soleil
Temps dérobé
Où expirent bavardages et obséquiosité
Temps où les villes cessent leur racolage
Où l’on se trouve nu
Le lac perd son voile métallique
Garonne exhibe l’aine de ses ponts
L’eau dans sa peau frémissante outremer féminine
Expose ses îles et ses rives
Où pataugent des oiseaux impudiques
Promesses de hauts-fonds secrets
Où d’estuaires ultramarins
3
À l’heure sourde de la colère solaire
Sous le cobalt du ciel porté à blanc
Paupières et jambes se pétrifient
C’est alors que l’iris se retourne pour descendre au
fond du dedans
Attiser dans le labyrinthe du ventre
Le réveil d’un autre monde
Aux lents ébats de nageoires plaintives
Aux torpilles électriques tapies sous la toison des
algues
Vibrionnant de haute tension
Mollusques béants d’espérances faméliques
Palpitant de terreur devant les dentitions de grands
squales préhistoriques
Attendant leur temps
4
Être au côté du corps
Cohabiter avec le lisse inouï de la chair
Écouter le souffle distiller l’air
L’aspirer
Se nourrir de sa moiteur
Discret bouillonnement de son vertige intérieur
S’abreuver l’œil au-delà de la fatigue
Voir comme boire
Boire le rond d’un sein d’une épaule d’une hanche
Boire le duvet léger frisottant
Boire la courbe d’une échine
Et se nourrir goulu de l’être d’une jambe
Certitude mollet cuisse fesse
Se laisser pénétrer par le miracle
Du désir
Francis PORNON
Extrait de Midi
Ed. Encres vives 2013, avec dessins d’Alexandre Meylan.
………………………………………………
PHILIPPE SAHUC
Corps, Balo, Body, Ruumis,
Gorputz, Yaram et confins de langues
Balo
Tu es à droite, « gardabous »,
Vieux tirailleur va !
A gauche proche d’enfanter,
Feras-tu moins de pépins que la calebasse ton
ombre ?
Body
Tu es de droite au garde-à-vous,
Oreillettes empilées, va !
A gauche s’initie la fronde,
D’obole et de dinar gavé, te dévoues-tu contre
elle ?
Ruumis
Calé contre la muraille droite,
Va, la modestie n’est pas ton faible !
A gauche tu finaudes,
Trolle, rat, serpent, fine oie : blason trop bien
garni ?
Gorputz
La chistera s’est faite dextre,
Reste, c’est la balle qui viendra à toi !
A gauche nul ne sait ton absence d’aise,
Ne hisses-tu pas en poing d’honneur une parole jamais
vaine ?
Yaram
Piquet de droite,
Fais le malin serpent va !
L’ondulation n’est pas gauche à l’entraîné Baye Fall,
Ne sais-tu pas ainsi redoubler le creuset des corps de
couleurs provocantes ?
Philippe Sahuc Saüc et ses amies mandinkan, anglaise,
finnoise, basque, wolof
…………………………………………..
SVANTE SVAHNSTRÖM
La guerre des mondes est déclarée
Néanmoins le mal n’est pas venu de Mars
Une invasion accélérée
a pris au dépourvu les arsenaux de protection
Chaque jour se multiplie la soldatesque ennemie
Ils grouillent en surpeuplant le millimètre
à cent mille têtes chaque fois
Ils grouillent sur la planète
Comme d’odorantes oranges
que ceignent des clous de girofle
rebondissant en rafales expectorées
ces couronnes voltigent
en venimeuses grenades dégoupillées
Or, c’est plongées dans les profondeurs
que s’élaborent les offensives
Des avant-gardes effacent d’abord
commandes d’odeur et de saveur
paralysent et neutralisent
papilles et narines
Devant les impasses pulmonaires
les conquérants viraux se positionnent en embuscade
En masse des hommes arrêtent de respirer
Menacée l’Espèce se recroqueville
Non, le danger n’est pas venu du ciel
La guerre des mondes est déclarée d’en bas
Les conflagrations s’opèrent
sur des champs d’honneur cachés à l’œil
Par-ci c’est à mains propres
par-là c’est en blouse blanche
que la riposte se mobilise
26 mars 2020
......................................
CHRIS TAAL
"Tout ce que le corps aurait à dire
S’il se mettait à écrire
Tout ce qu’il aurait à dire…
Tout ce qui est contenu
Que j’entends gémir
Qui voudrait tant sortir
Si seulement on laissait transpirer nos sentiments !
Les mots,
A la surface de la peau
Délivrant,
Tel un livre ouvert
Les secrets
A qui saurait les effleurer
Sous la plume
de son stylo
Les mots se mettraient à courir
Le long de mes bras
Escaladant chacun de mes dix doigts
Dévalant la page d’un air narquois
Dévalant chacun de mes doigts
Noircissant la virginité de ma feuille esseulée
Et les doigts et la page reliés…
Tout ce que tu n’avais su dire
Et qui soudain m’était conté"
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire