samedi 17 décembre 2022

CIEL ET ÉTOILES

 

Nuit étoilée sur le Rhône - Vincent van Gogh

 

 

 

AUTEURS

Guillaume Apollinaire *
Pierre Auger****
Nanou Auriol
Charles Baudelaire *
Karin Boye *

André Chénier ****
Jean CIZO et B.B Alain ***

Edward Eastling Cummings **
Hjalmar Gullberg ****
Stephen Moysan ****
Nicole Sibille
Paul Verlaine *
Svante Svahnström

 

* - présenté par Nicole Sibille

** - présenté par Didier Metenier

***  - présenté par Bernard Auriol

                                                            **** - présenté par Svante Svahnström









GUILLAUME APOLLINAIRE


Clair de Lune

Lune mellifluente aux lèvres des déments
Les vergers et les bourgs cette nuit sont gourmands
Les astres assez bien figurent les abeilles
De ce miel lumineux qui dégoutte des treilles
Car voici que tout doux et leur tombant du ciel
Chaque rayon de lune est un rayon de miel
Or caché je conçois la très douce aventure
J’ai peur du dard de feu de cette abeille Arcture
Qui posa dans mes mains des rayons décevants
Et prit son miel lunaire à la rose des vents

Alcools, 1913
……………………….

PIERRE AUGER
 

Astrophysique

Au fond de l'âme du savant
Vit un poète
Qui va parfois lui inspirant
Un air de fête
Et peut alors sans ridicule
Trouver du charme aux particules
Et lever sur l'antimatière
L'étrange arc-en-ciel du mystère !
Sur le globe les continents
Dansent un ballet languissant.
Les étoiles du firmament
À des milliers d'années-lumière
Sont comme des grains de poussière
Sur la peau d'un ballon d'enfant
Que gonfle un souffle transcendant
Après l'explosion initiale
Créant tout, d'un coup de cymbales !
Mais le Néant n'est pas vaincu :
Les trous noirs sont sa descendance
Et qui en approche est tenu
D'abandonner toute espérance.

…………………..


NANOU AURIOL 

Une étoile

Si à chaque naissance pousse un arbre, une rose, un cyprès,
J'aimerais qu'une étoile s'accroche à l'univers
Comme à ces beaux sapins de mon enfance
Majestueux, agrippés au pied de l'escalier ciré
Où tu allumais ces bougies pincées sur une branche
La "grande filante" au sommet du pic vert.

Si à chaque dessin, je posais trois soleils
au-dessus d'une cheminée fumante et bien bâtie
Tu entrais comme un astre dans le ciel de ma vie.
Fillette admirative à l'âge des boutons d'or
Tout brillait dans mes yeux, tu étais mon idole
Lorsque tu me portais dans tes bras de Major
Où me tenais la main jusqu'au seuil de l'école.

Tout comme un arbre, une fleur, un humain
Les astres meurent un jour désespérément usés.
De la voûte céleste, vacille un destin
C'est la mort d'une étoile en paillettes d'amour
Décrochée lentement d'un fil d'or en guirlande;
Présence d'un voile noir au déclin des vieux jours .

Rien n'est plus beau qu'une pluie fine d'argent
Éclairant le ciel pâle dans une nuit d'été.
Rien n'est plus douloureux qu'une vie étiolée
Passé d'un grand soleil qui éteint son présent
Laissant un trou noir, une absence, dans un coeur attristé.


                                        Mai juin 93. A mon père.

………………….


CHARLES BAUDELAIRE  1821 - 1867

 
Le soleil


Le long du vieux faubourg, où pendent aux masures
Les persiennes, abri des secrètes luxures,
Quand le soleil cruel frappe à traits redoublés
Sur la ville et les champs, sur les toits et les blés,
Je vais m'exercer seul à ma fantasque escrime,
Flairant dans tous les coins les hasards de la rime,
Trébuchant sur les mots comme sur les pavés,
Heurtant parfois des vers depuis longtemps rêvés.

Ce père nourricier, ennemi des chloroses,
Eveille dans les champs les vers comme les roses ;
Il fait s'évaporer les soucis vers le ciel,
Et remplit les cerveaux et les ruches de miel.
C'est lui qui rajeunit les porteurs de béquilles
Et les rend gais et doux comme des jeunes filles,
Et commande aux moissons de croître et de mûrir
Dans le coeur immortel qui toujours veut fleurir !

Quand, ainsi qu'un poète, il descend dans les villes,
Il ennoblit le sort des choses les plus viles,
Et s'introduit en roi, sans bruit et sans valets,
Dans tous les hôpitaux et dans tous les palais

……
Tristesses de la Lune
Ce soir, la lune rêve avec plus de paresse ;
Ainsi qu’une beauté, sur de nombreux coussins,
Qui d’une main distraite et légère caresse
Avant de s’endormir le contour de ses seins,

Sur le dos satiné des molles avalanches,
Mourante, elle se livre aux longues pâmoisons,
Et promène ses yeux sur les visions blanches
Qui montent dans l’azur comme des floraisons.

Quand parfois sur ce globe, en sa langueur oisive,
Elle laisse filer une larme furtive,
Un poëte pieux, ennemi du sommeil,

Dans le creux de sa main prend cette larme pâle,
Aux reflets irisés comme un fragment d’opale,
Et la met dans son cœur loin des yeux du soleil.

in Les Fleurs du Mal
………………………….


KARIN BOYE  Suède 1900-1941

KUNDE JAG FÖLJA DIG

Kunde jag följa dig långt bort
längre än allt du vet,
ut i de yttersta rymdernas världsensamhet,
där Vintergatan rullar
ett bjärt dött skum
och där du söker ett fäste
i hisnande rum

Jag vet : det går inte.

Men när du stiger huttrande
blind ur ditt dop                                          tvärs igenom rymden
skall jag höra ditt rop,
vara dig ny värme
vara dig ny famn
vara dig när i en annan värld
bland ting med ofött namn

Si je pouvais te suivre

Si je pouvais te suivre bien loin,
plus loin que tout ce que tu sais,
dans la solitude du monde
des espaces extrêmes,
là où la Voie lactée roule
une lumineuse écume morte
et où tu cherches une attache
dans un espace vertigineux.

Je sais : ce n'est pas possible.

Mais quand aveugle et grelottant,
tu sortiras de ton baptême,
d'un bout à l'autre de l'espace
je vais entendre ton cri,
être pour toi chaleur nouvelle,
être pour toi étreinte nouvelle,
être proche de toi dans un autre monde
parmi des choses au nom inenfanté.


……………………….

ANDRÉ CHENIER

L'AMERIQUE (extrait)

Muse, muse nocturne, apporte-moi ma lyre
Comme un fier météore, en ton brûlant délire
Lance-toi dans l'espace, et pour franchir les airs
Prends les ailes des vents, les ailes des éclairs,
Les bonds de la comète aux longs cheveux de flamme...
(…)
Accours reine du monde, éternelle Uranie
Soit que tes pas divins sur l'astre du Lion
Ou sur les triples feux du superbe Orion
Marchent, ou soit qu'au loin, fugitive emportée,
Tu suives les détours de la voie argentée,
Soleils amoncelés dans le céleste azur
Où le peuple a cru voir des traces de lait pur ;
Descends, non, porte-moi sur la route brûlante,
Que je m'élève au ciel comme une flamme ardente
Déjà ce corps pesant se détache de moi.
Adieu tombeau de chair, je ne suis plus à toi.
Terre, fuis mes pas. L'éther où le ciel nage
M'aspire. Je parcours l'océan sans rivage
Plus de nuit.
(…)
Plus de nuit, et mon œil se perd et se mêle
Dans les torrent profonds de lumière éternelle.
Me voici sur les feux que le langage humain
Nomme Cassiopée et l'Ourse et le Dauphin.
Maintenant la Couronne autour de moi s'embrase.
Ici l'Aigle et le Cygne et la Lyre et Pégase
Abîmes de clarté, où libre de ses fers
L'homme siège au conseil qui créa l'univers ;
Où l'âme remontant à sa grande origine
Sent qu'elle est une part de l'essence divine.

……………………………….

Jean CIZO et B.B Alain

Matin

Le temple d'émeraude à colonnes gothiques
Laisse filtrer le jour pour nous dire d'aimer
Et de plier à terre un genou sarcastique
Pour adorer le grand Nirva qui a tout créé.
L'éventail du matin ouvre de larges palmes,
L'herbe jette à mes pieds ses diamants et ses larmes,
Les liserons bleutés défroissent leurs tuniques
Et boivent la douceur d'une nuit platonique ;

L'énorme point d'un I naissait à l'horizon
Des montagnes de fleurs croulaient au ciel vermeil,
Et le matin naissait, splendide et sans pareil.


in Bulles bleues

....................................


EDWARD EASTLING CUMMINGS       (traduction Didier Metenier)

now that, more nearest even than your fate

            and mine (or any truth beyond perceive)
            quivers this miracle of summer night

            her trillion secrets touchoubly alive
            - while and all the mysteries which i or you
            (blinded by merely things believable)
            could only fancy we should never know

            are unimaginably ours to feel -
         
            how should some world (we marvel) doubt, for just
            sweet terrifying the particular
            moment it takes one very falling most
            (there : did you see it?) star to desappear,

            that hugest whole creation may be less
            incalculable than a single kiss

              # 37, 73 poems, Edouard Estling Cummings, Faber and Faber Limited, 1974 (1963)
…...

             maintenant que, encore plus près de ton propre destin ou du mien

             (ou de n'importe quelle vérité hors d'atteinte)
             alors que tremblent ce miracle de la nuit d'été

             et ses trillions de secrets palpablement vivants

             - alors que tous ces mystères que toi et moi
             (déjà aveuglés par les seules réalités intelligibles)
             nous sommes présumés ne jamais découvrir

             voilà que tout est livré à nos sens -
 
             comment un monde pourrait-il (nous sommes tout émerveillés)
             douter, alors qu'il est tellement grisant de se laisser terrifier
             pendant le court instant qu'il faut à une étoile toute filante
             (là, la vois-tu, là-bas) pour disparaître,

             cette création dans son incommensurable totalité
             n'est peut-être pas plus difficile à évaluer q'un simple baiser

…………………….

HJALMAR GULLBERG   Suède  1898-1961

EXTASE

Bientôt nos terrestres carcasses
Ne pourront plus nous torturer
Dans l’antichambre, entre deux glaces,
Se tient un valet bien stylé
Qui sans un mot nous débarrasse,
Messieurs et Dames épuisés,
de ces pesantes carapaces.

Et tandis qu’il dépose en cinq casiers divers
Oreilles, nez, langue, peau, yeux,
Nos âmes à genoux s’exhalent en prières ;
Et par milliers des étoiles éclairent
L’immensité de la rotonde bleue
Où nous allons enfin nous trouver devant Dieu.

……………………………….

CATHERINE DE MONPEZAT

En attente

………………………

STEPHEN MOYSAN

D’un sperme étoilé
La voûte s’est constellée
Adultères autant que de soeurs
Dans la voie lactée La lune a la rondeur
D’une mamelle sèche
Son père soleil est une mère chaleur
Il l’a allaitée au lait de sa crèche !

https://www.eternels-eclairs.fr/poesie-poemes-nuit-lune-etoiles.php

……………….

NICOLE SIBILLE

Mes étoiles  (décembre 2022)

J’étais enfant,
ils m'ont enseigné
l'étoile du berger,
et la voie lactée
qu'ils appelaient
le Chemin de Saint Jacques,
et aussi l'étoile qui guida les mages,
de l'Orient jusqu'à la crèche d'un nouveau-né,
le Messie d'amour et de paix.

Plus tard, j'ai aimé
les douze étoiles accrochées
au bleu d’un  drapeau
qui, malgré les vents mauvais,
éclairent les avancées
de notre Europe souvent déchirée.

Ces étoiles venues du ciel
m'ont guidée,
nous ont guidés,
et nous éclairent encore,
sans doute pour toujours.

D'autres étoiles ont été inventées,
les étoiles des arbres de Noël,
des guirlandes et des vitrines.
Elles scintillent pour nous faire plaisir,
peut-être pour nous éblouir,
sans rien nous dire.

Encore d’autres étoiles inventées,
celles des hôtels,
celles des toques des chefs de cuisine,
ou encore celles des képis des généraux,
même sans briller,
en vain, veulent nous informer.

Et voici que, tous les jours, sur la Toile,
nous sont proposées
des étoiles à cocher.
Nous sommes devenus maîtres des étoiles,
pauvres internautes, maîtres d’étoiles
pour mieux consommer !

Mas estèlas                                           
(Revirada de Joan e Nicòla Sibille) 

Èri mainada,
m’ensenhèron lo lugarn,
 l’estèla del ser, l’estèla del matin,
e lo riban de posca d’estèlas
qu’apelavan
lo Camin de Sant Jaume,
emai l’estèla que guidèt los Reis,
d’al Levant dusc’a la grèpia d’un nenon,
lo Messia d’amor e de patz.

Pus tard, aimèri
las dotze estèlas encrocadas
al blau d’un drapèu
que, malgrat los vents contraris
esclairan las avançadas
de nòstra Euròpa sovent desunida.

Aquelas estèlas vengudas d’al cèl
m’an guidada,
nos an guidats
e encara nos esclairan
saique per totjorn.

D’autras estèlas foguèron inventadas,
las estèlas dels albres de Nadal,
de las garlandas e de las veirinas.
Beluguejan per nos far plaser,
benlèu per nos embalausir,
sens nos dire res.

Encara maitas estèlas inventadas,
las de las ostalariás,
las de las tòcas dels cosinièrs,
o encara las dels kèpis dels generals
emai sens lusir,
en van, nos vòlon informar.

E aquí que cada jorn, sus la Tela,
nos propausan
d’estèlas per oscar.
Sèm venguts mèstres de las estèlas,
paures internautas, mèstres d’estèlas
per melhor consomar !

 

.........................


PAUL VERLAINE

Le ciel est, par-dessus…
Le ciel est, par-dessus le toit,
Si bleu, si calme !
Un arbre, par-dessus le toit,
Berce sa palme.
La cloche, dans le ciel qu’on voit,
Doucement tinte.
Un oiseau sur l’arbre qu’on voit
Chante sa plainte.
Mon Dieu, mon Dieu, la vie est là,
Simple et tranquille.
Cette paisible rumeur-là
Vient de la ville.
– Qu’as-tu fait, ô toi que voilà
Pleurant sans cesse,
Dis, qu’as-tu fait, toi que voilà,
De ta jeunesse ?
in Sagesse (1881)
…………………………


SVANTE SVAHNSTRÖM

Le temps tapote avec une cuillère à café
sur la table de l’infinitude
L’existence est monotone au firmament
Tous ces soleils qui gémissent puis s’éteignent
sans répit
Mille par clin d’oeil
Vies insignifiantes et victoires en microscope
dans les couronnes rafraîchies des corps fondants
Il s’agit d’errements sans intérêt
Dans les organes internes du vide
le temps est un serviteur de temple
las du grand écart permanent

in Languier,  2003

jeudi 24 novembre 2022

EROS

 

 

Une jeune fille se défendant contre Eros - William Adolphe Bouguereau

AUTEURS

Guy Béart *
Bilhana  Inde XIe siècle *****
Edouard Estling Cummings **
Comtessa Beatritz de Dia  XIIe siècle   *****
Paul Éluard *
Tiziana Gallian ***
Peire Godolin ***
Khosrovâni Perse, Xe siècle *****
Habashli Kunzeï *****
Louise Labé ****
Aurelia Lassaca ***
Clément Marot *****
Henri de Monpezat ****
Caterina Ramonda ***
Ahmed Ibn Souleimân  Turquie  XVIe siècle *****
Svante Svahnström

Présenté par:
*Évelyne Bruniquel
** Didier Metenier
*** Nicole Sibille
**** Nanou Auriol
***** Svante Svahnström



GUY BÉART

CHANDERNAGOR

Elle avait elle avait
Un Chandernagor de classe
Elle avait elle avait
Un Chandernagor râblé
Pour moi seul pour moi seul
Elle découvrait ses cachemires
Ses jardins ses beaux quartiers
Enfin son Chandernagor
Pas question
Dans ces conditions
D'abandonner les Comptoirs de l'Inde

Elle avait elle avait
Deux Yanaon de cocagne
Elle avait elle avait
Deux Yanaon ronds et frais
Et moi seul et moi seul
M'aventurais dans sa brousse
Ses vallées ses vallons
Ses collines de Yanaon
Pas question
Dans ces conditions
D'abandonner les Comptoirs de l'Inde

Elle avait elle avait
Le Karikal difficile
Elle avait elle avait
Le Karikal mal luné
Mais la nuit j'atteignais
Son nirvana à heure fixe
Et cela en dépit
De son fichu Karikal
Pas question
Dans ces conditions
D'abandonner les Comptoirs de l'Inde

Elle avait elle avait
Un petit Mahé fragile
Elle avait elle avait
Un petit Mahé secret
Mais je dus à la mousson
Eteindre mes feux de Bengale
M'arracher m'arracher
Aux délices de Mahé
Pas question
Dans ces conditions
De faire long feu dans les Comptoirs de l'Inde

Elle avait elle avait
Le Pondichéry facile
Elle avait elle avait
Le Pondichéry accueillant
Aussitôt aussitôt
C'est à un nouveau touriste
Qu'elle fit voir son comptoir
Sa flore sa géographie
Pas question
Dans ces conditions
De revoir un jour les Comptoirs de l'Inde
.....................................

BILHANA  Inde  XIe siècle - sanskrit

Encore aujourd'hui
Je songe à elle
Eblouissante avec ses guirlandes de fleurs de campaka,
Son visage pareil au lotus épanoui,
Sa taille, une tendre ligne de duvet,
Le corps frémissant de désir au sortir du sommeil -
Ma bien aimée -
Sortilège
Dont, par ma folie,
J'ai été dépossédé.

Encore aujourd'hui
Il me souvient
Du visage de ma bien-aimée :
Les anneaux d'or à ses oreilles frôlaient ses joues,
Tant était grande, dans l'amour, son ardeur
A inverser les rôles
Et, au rythme de ses mouvements,
Telles des perles à foison,
De larges gouttes de sueur constellaient sa peau.
 
Encore aujourd'hui
Si je revoyais
Ma bien-aimée
Au visage semblable à la lune en son plein,
Riche de sa jeunesse fraîche éclose,
Aux seins gonflés,
A l'éclatante beauté,
Au corps torturé par la saveur de l'amour,
Ce corps,
Je saurais aussitôt comment le rafraîchir !

Encore aujourd'hui
De même que sur l'enseignement d'un maître,
Sur elle médite mon esprit :
Sa noire chevelure ondulée et soyeuse,
Ses longs yeux pareils aux pétales d'un lotus épanoui,
Ses seins ronds et hauts, fermes et pleins.

Encore aujourd'hui
Il me souvient intensément
Du visage de ma bien-aimée
Dans l'espace du plaisir,
Les prunelles frémissantes dans les yeux qui se ferment,
Le rayonnement de la chair que les soupirs aussitôt
Affadissent,
Les gouttes de sueur sur la peau moite.

Encore aujourd'hui
Je vois
Ses hanches dévêtues
Et le trouble de son corps
Qu'égare la saveur même de la crainte,
Quand, d'une main cachant son secret,
De l'autre elle attire mes doigts dans le creux de sa taille.

Encore aujourd'hui
Je la vois
Qui contemple en secret
Le miroir où se réfléchit mon image,
Comme je me tiens dans son dos,
Tremblante et troublée,
Timide dans sa langueur,
Passionnée et pleine de grâce.

Encore aujourd'hui
Je vois
Ses beaux yeux animés et inquiets,
Quand, d'un lotus arraché à notre lit d'amour,
Elle chassait l'abeille venue près de sa bouche,
Enivrée par sa riche senteur parfumée.

Encore aujourd'hui
Je la vois
Qui erre
Ici et là,
Devant, derrière,
Dehors, dedans,
En tous lieux,
Son visage pareil au lotus épanoui,
Promenant de tous côtés ses beaux yeux.

Nota bene :
campaka – arbuste de la famille du gingembre, à fleurs odorantes.

UN FEU AU CŒUR DU VENT
Trésor de la poésie inddienne
Des Védas au XXIe siècle


............................


EDOUARD ESTLING CUMMINGS (1962) – Traduction Didier Metenier

 

     

     N  W   
o
H
s
l o w
h
G
My oD


(op.citato, Dreams in the mirror,
Richard S. Kennedy, Liveright, 1980)             

 


 

 maint
e
nan
t
n
e
m
m
o
c
lent
e
m
e
n
t
oh !
ôôô
Oui
iii


ÔÔÔ
!!!
h
hou
a
w


 

……………………………

COMTESSA BEATRITZ DE DIA   Provence  XIIe siècle

 

Ben volria mon cavalièr
tener un ser en mos
bratz nut
qu’el s’en tengra per ereubut
sol qu’a lui fezés cosselhièr

 

Je voudrais bien
tenir un soir mon cavalier
nu dans mes bras
et qu’il se tienne pour comblé
si je lui servais de coussin

 



……………………………….


PAUL ÉLUARD

JE T’AIME
Je t’aime pour toutes les femmes que je n’ai pas connues
Je t’aime pour tous les temps où je n’ai pas vécu
Pour l’odeur du grand large et l’odeur du pain chaud
Pour la neige qui fond pour les premières fleurs
Pour les animaux purs que l’homme n’effraie pas
Je t’aime pour aimer
Je t’aime pour toutes les femmes que je n’aime pas

Qui me reflète sinon toi-même je me vois si peu
Sans toi je ne vois rien qu’une étendue déserte
Entre autrefois et aujourd’hui
Il y a eu tous ces morts que j’ai franchies sur de la paille
Je n’ai pas pu percer le mur de mon miroir
Il m’a fallu apprendre mot par mot la vie
Comme on oublie

Je t’aime pour ta sagesse qui n’est pas la mienne
Pour la santé
Je t’aime contre tout ce qui n’est qu’illusion
Pour ce cœur immortel que je ne détiens plus
Tu crois être le doute et tu n’es que la raison
Tu es le grand soleil qui me monte à la tête
Quand je suis sûr de moi.

………………………..


       TIZIANA GALLIAN  (1965)

PAS PUS DE PARÒLAS

Chamino dins tas peaas
Un pas après l’autre ;
Sai jà enté me mènes,
Lo solelh encima

T’arompines sensa pèna
Drant a mi, asus de la comba,
Mis uelhs sus ton copet
E sus la pel de ton eissina

Fòrta es ta chamba d’acant a la ròcha,
Segura es ta cueissa abituaa ;
estento de m’amorar a ton ventre
dins aquela tampa perfumaa.

Coma son tindats tis muscles,
coma es drut ton flanc,
volariu caressear tas cuòstas
e chasque piecha de ton còrp.

Vire-te e sourie-me
Sarre-me
Contra ton estomi
Tramòulo e sospiro
L’estrecha de tis braç.
Quina la testa
E avesina ta bocha,
ervisca la breisela
que es en tren a se tuar.
Cotja-me dins l’erba
Un còussin de violetas ;
Coma es chauda la tèrra
Lhi sabaré nos cunar.

Embracem-se enca’un bòt,
eilamon dreire lo serre :
garisson pas-pus las paròlas
las cisanhas de nòstri còrs.

in PARAULAS DE HEMNAS – Tòme 1
Edicions Reclams

PLUS DE PAROLES

Je marche dans tes traces
Un pas après l’autre ;
Je sais où tu m’emmènes,
Le soleil se lève.

Tu grimpes sans effort
Devant moi dans la combe,
Mes yeux vers ta tête
Et tes épaules.

Puissante est ta jambe à côté du rocher,
Solide est ta cuisse endurcie ;
je me languis de m’approcher de toi
dans cette prairie parfumée.

Comme tes muscles sont tendus,
Comme ton flanc est doux,
je voudrais caresser ta poitrine
et chaque pli de ton corps.

Tourne-toi et souris-moi
Serre-moi
Contre toi
Je tremble et désire
La force de tes bras
Penche-toi
Et approche tes lèvres
ravive l’étincelle
qui va s’éteindre
Allonge-moi dans l’herbe
Sur un oreiller de violettes
Comme la terre est chaude
Elle saura nous bercer.

Embrassons-nous encore une fois
là-haut derrière la colline :
les mots ne guérissent plus
les blessures de nos cœurs.


………………………


PEIRE
GODOLIN (1580-1649)

Sonet

La pastora Lirís es tan jàntia e polida
Que se’pòsca trovar jos la capa del Cèl
Als fredons qu’ela fa sur un aire novèl
La Serena de Mar se trobariá rabida.

D’un quicòm de vesiat sa paraula seguida
Un guinhon frisotat que se tòrç en anèl,
Un lambrec amorós qu’escapa de son uèlh
Sur tota autra beutat la tenen acomplida.

Simple, mès cotinaud es son abilhament,
E d’aquí me reven un gran contentament
Car atal ela par plus gentila e bragarda.

Doncas en preferant le naturel a l’art
Tanlèu qu’en companhiá la vesi sense fard
Ieu voldriái cap a cao la véser sense farda.

Sonnet

Qu’elle est gente et jolie, la Bergère Lirís !
On ne peut trouver mieux sous la cape des Cieux ;
Aux airs qu’elle fredonne en harmonie nouvelle,
La Sirène des Mers s’en trouverait ravie.

Un rien de gracieux couronnant son discours,
Une boucle frisée enroulée en anneau,
Un éclair amoureux évadé de ses yeux,
Sur toute autre beauté font triompher la sienne.

Simple mais avenant est son habillement,
Et de là naît en moi un grand contentement
Car elle semble ainsi plus aimable et galante.

Mais comme j’aime mieux le naturel à l’art,
Sitôt que je la vois, en compagnie, sans fard,
Sans hardes, je voudrais l’avoir en tête à tête.

 in Œuvres complètes  






 

………………………….


KHOSROVÂNI  Perse Xe siècle

LA NUIT QUI NOUS SÉPARE

La nuit qui nous unirait est comme l’air insaisissable,
   la nuit qui nous sépare semble durer mille ans.
Longue nuit, longs chagrins, longue querelle,
   à ces trois ennemis comment résisterais-je ?
Combien de soirs où je n’eus pour compagnes
   que ton absence et la vaine espérance
Toute la nuit ton image est là, merveille ! auprès de moi ;
   toute la nuit mon âme est l’esclave d’une image.
Tu m’avais promis trois baisers :
   permets que je les prenne avant qu’en vain tu le regrettes
Non, je n’aurais pas cru, bel astre au regard noir,
   que les astres avaient la coquetterie des gazelles.
Je te suis soumis, ma déesse, ne me sois point cruelle :
   la cruauté messied aux belles comme toi.
Aurais-tu lu dans le livre d’amour
   qu’il est licite  de verser le sang des cœurs que l’on a pris ?
Tu en veux à ma vie, folle, tu chicanes :
   que peux-tu donc plaider encore que je te l’ai donnée ?
Sois fidèle, sois bonne aujourd’hui qu’il est temps,
   il se peut que demain les choses aient changé.

in Anthologie de la poésie persane, Gallimard/Unesco

………………….

HABASHI KUNZEÏ    

LE HÄIKU, TENDRE, ÉROTIQUE : PETITES PIÈCES D’AMOUR

Extraits


Sur le mur d’en face
Une ombre me fait désirer
L’amant oublié

De ma fenêtre
Nuages moutonneux
Hanches de ma voisine

Les rêves
De la femme nue
Couchée dans les fleurs

Les libellules
Font l’amour
Sans dire je t’aime

Mains trop habiles
Qui furent les apprentis
De ton savoir-faire ?

Renversée dans les coussins
Lèvres entrouvertes
Mes collègues déjeunent

Si tu veux découvrir
Toutes les voluptés
Ne convoque pas ta conscience

Continue donc
Ce va-et-vient
Mon bel artisan

Ouvrant les yeux
La fille au réveil
Cherche son âme


https://actualitte.com/article/35034/chroniques/le-haiku-tendre-erotique-petites-pieces-d-amour


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LOUISE LABÉ

SONNETS

O beaux, ô regards destournez
O chaus soupirs, ô larmes espandues,
O noires nuits vainement atendues,
O jours luisans, vainement retournez :

O tristes pleins, ô désirs obstinez,
O tems perdu, ô peines despendues,
O mile morts en mile rets tendues,
O pires maus contre moy destinez.

O ris, ô front, cheveux, bras, mains et doigts :
O lut pleintif, viole, archet et voix :
Tant de flambeaux pour ardre une femme !
De toy me plein, que tant de feus portant,
En tant d’endroits d’iceus mon cœur tatant,
N’en est sur toy volé quelque étincelle.

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Baise m’encor, rebaise moy et baise :
Donne m’en un de tes plus savoureus,
Donne m’en un  de tes plus amoureus :
Je t’en rendray quatre plus chaus que braise.

Las, te pleins-tu ? ça que ce mal j’apaise,
En t’en donnant dix autres doucereus.
Ainsi meslans nos baisers tant heureus
Jouissons nous l’un de l’autre à notre aise.

Lors double vie à chacun en suivra.
Chacun en soy et son ami vivra.
Permets m’Amour penser quelque folie :

Toujours suis mal, vivant discrettement,
Et ne me puis donner contentement,
Si hors de moy ne fay quelque saillie.

in La poésie érotique, Seghers
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AURELIA LASSACA  (1983)

LA SANSOINA DE LA FEMNA-FLAÜTA

Voldriái que me sèrves contra tu
Dins una pòcha al mai prèp del còr
Que ton buf m’atraverse

Seràs la boca e serai la votz
E cantarem ensem
Quora balaràn los faunes

Ven, del bot del det
Comblar çò qu’en ieu
Dona lutz al silenci

Vòli limpar entre tas labras masclas
Me trovar captiva
E te saber prodigi

T’aprendrai a legir
Aquesta autra partición
Que duscas a l’alba
Nos veirà falhir

Pro que m’acòrdes
Ta nuèch a venir

CANTILÈNE DE LA FEMME-FLÛTE



Je voudrais que tu me gardes contre toi
Dans une poche tout près du cœur
Que ton souffle me traverse

Tu seras la bouche et je serai la voix
Et nous chanterons ensemble
Quand danseront les faunes

Viens, du bout des doigts
Combler ce qui en moi
Fait jour au silence

Je veux glisser entre tes lèvres mâles
Me découvrir captive
Et te savoir prodige

Je t’apprendrai à lire
Cette autre partition
Qui jusqu’à l’aube
Nous verra faillir

Pourvu que tu m’accordes
Ta prochaine nuit

 


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CLÉMENT MAROT

D’UNE ÉPOUSÉE FAROUCHE

L’épousé la première nuit
Rassurait sa femme farouche :
Mordez-moi, dit-il, s’il vous cuit,
Voilà mon doigt en votre bouche.
Elle y consent, il s’escarmouche
Et après qu’il l’eut deshousée :
Or ça, dit-il tendre rusée,
Vous ai-je fait du mal ainsi ?
Adonc répondit l’éspousée :
Je ne vous ai pas mors aussi.


in La poésie érotique, Seghers
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HENRI DE MONPEZAT

AMOUR GAILLARD


Amour gaillard
Chaudes paroles
Profonds regards
Eros vole


Pérégrinations autour de ma tête
Haîkous



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       CATERINA RAMONDA (1978)

SENTIR QUE L’AUTRE…

Sentir que l’autre es l’araire
que esclapa la pel,
que duèrb la charn e
que l’emplìs de lutz.
Que la duèrb a l’esluci del gaubi.

 

PARAULAS DE HEMNAS – Tòme 1
Edicions Reclams

SENTIR QUE L’AUTRE…

Sentir que l’autre est l’araire
qui fend la peau
qui ouvre la chair et
l’inonde de lumière.
Qui l’ouvre à l’éclair de la joie.



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AHMED IBN SOULEIMÂN  Turquie  XVIe siècle

DES CONTES

(...)

Préambule


Ibn Abi Hassan al-Warraq rapporte qu’Abou Bakr Ibn Ayyoub raconte l’histoire suivante :
Nous avions un ami d’une compagie fort ageréable. Il était au service du vizir d’Al-Mou’tadid. Il raconta qu’une nuit qu’il s’était  retrouvé avec un groupe d’amis chez un autre  vizir du nom Qotb ed-Din, adîb et poète, toujours pris de vin. Son fils avait invité ses compagnons de plaisir, ses intimes et dix jeunes filles. Dans tout Bagdad, il n’y en avait pas de plus belles que celles-ci. Qotb ed-Din était d’une générosité remarquable et donnait sans compter.
   Pour cette soirée, il fut d'une prodigalité extrême. Le vin coula à profusion, les chanteuses se surpassèrent et ces moments furent d'une gaieté telle qu'il semblait que tous ceux qui étaient là voulaient profiter de cette félicité, redoutant des heures qui seraient moins heureuses. Ils s'adonnèrent allègrement au bonheur, se grisant de vin et de chant, se récitant force poèmes et échangeant maints propos délicats. Ils en vinrent au sexe, au plaisir qu'il procure, à la volupté qu'on en attend et ils déclarèrent que le plaisir de la femme est supérieur à celui de l'homme.
   Il se trouva quelqu'un pour dire que la femme était insatiable, l'homme moins endurant et que le désir peut lui manquer quand il en abuse. Davantage ! Ils prétendirent que la femme peut faire l'amour nuit et jour pendant de nombreuses années, et qu'elle en redemanderait encore !
   On rapporte ainsi qu'un certain roi avait trois cent soixante concubines qui avaient, chacune, leur jour dans l'année. Un jour de fête, elles se retrouvèrent ensemble avec le roi. Il but et s'enivra. Certaines concubines dansèrent, d'autres chantèrent. L'amusement du roi était à son comble. Il s'adressa alors à ses concubines en ces termes :
« Malheur à vous ! Que chacune d'entre vous me confesse son désir le plus cher, je le réaliserai à l'instant ! »
Toutes s'exécutèrent et la dernière de dire :
« O roi ! Ce que je désire , c'est d'être rassasiée d'amour. »
Le roi s'emporta de colère et ordonna à tous les mâles du palais de la conjoindre. Mille jouirent d'elle, mais ne la rassasièrent point. Plus tard, le roi convoqua un sage et le mit au courant de l'histoire. Le sage conceilla de tuer la concubine, sinon elle pervertirait l'ensemble des habitants de la ville. Il ajouta que les entrailles de cette femme étaient à l'évidence à l'envers et que même si elle faisait l'amour à l'infini, elle ne serait jamais satisfaite.
Cette insatiabilité est le lot de bien des jeunes filles roumis et tout particulièrement de celles qui ont les yeux bleus. Certains sages affirment que la femme ne peut être heureuse qans qu'elle se fasse conjoindre.
Ainsi son corps s'épanouit, sa taille grandit et elle rajeunit chaque fois qu'elle hume l'odeur d'un mâle : gagnant en volupté, elle devient plus gaie et heureuse. Elle peut l'être davantage encore, surtout si elle change de partenaire et découvre ainsi de nouveaux plaisirs.
   A la fin de cet échange, le vizir réagit en disant qu'il était loin de se rendre compte de toutes ces choses. S'adressant aux jeunes filles présentes, il leur demanda de lui parler de sexe et de lui raconter leurs aventures personnelles. Il promit de récompenser celle qui saurait captiver son auditoire. Les dix filles de présentèrent et chacune d'elles raconta son histoire.

Première histoire.
   La première jeune fille à se présenter était d'une beauté remarquable, la taille fine et toute en harmonie. Elle n'aurait pas fait mentir le poème suivant :

Elle vint dans sa tunique verte drapée,
Telle du grenadier la feuille en sa fleur parée.
A ma question : qu'est-ce que « la chose », elle répondit
D'une voix mélodieuse à l'expression hardie :
« Servante de la verge, elle qui la reçoit,
Nous l'appelons fente de l'amertume. »

Elle s'agenouilla devant le vizir et se mit à raconter :
   Monseigneur, vos désirs sont des ordres ! Un jour que je me trouvais assise contre un mur, un jeune homme surgit subitement devant moi. Sa rapidité me coupa le souffle : il m'enlaça, me tint fermement contre sa poitrine et m'embrassa tant et tant qu'il me blessa les lèvres en les mordant. Ensuite, il me prit par les hanches, sortit un membre digne d'un mulet, l'humecta de sa salive, m'en frotta les lèvres du sexe. Peu habituée à ces choses, je tombai en pamoison et je ne savais plus si j'étais sur terre ou au ciel. Quand mes esprits me revinrent, je l'implorai de me prendre en pitié, sinon je mourrais. Mais peu lui importait, il me pénétra, se trémoussant tant qu'il put. Nous jouîmes en même temps, tous les deux, et il me relâcha. Ce jeune homme, je l'ai aimé à en perdre la raison. Nous sommes restés longtemps ensemble, mais la vie nous a séparés. O désolation ! Je regretterai toujours ces instants révolus de bonheur.


in Le bréviare arabe de l'amour

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SVANTE SVAHNSTRÖM


Inflexible se dresse un combattant
Son oeil balaie l’abysse
où fera fureur la conflagration
L’encerclement, issue probable,
ne le dissuade pas
Les probables secousses convulsives
sont érigées en principe fondateur
L’irrésistible chaleur de muqueuse
les huiles émulsifiées en bouillie
quasi primordiale
l’aiguillonnent
Derrière le rempart élastique
guette une réserve de torpilles en ébullition
Le torse bombé du combattant
pourrait briser l’armure transparente
Les projectiles de vie mutins
échapperaient au commandement
déferleraient aveuglés de rage fertile
vers les corps à corps des profondeurs

in Hocus Corpus, 2009