![]() |
Les travaux de mai - Leandro Bassano |
AUTEURS
Charles d’Orléans ****
Jean-Baptiste Clément *
Didier Metenier
Alfred de Musset **
Claude Nougaro **
Louisa Paulin **
Jean-Pierre Siméon ***
Jean-Michel Tartayre ****
Svante Svahnström
* Présenté par Patrick Zemlianoy
** Présenté par Nicole Sibille
*** Présenté par Evelyne Bruniquel
**** Présenté par Svante Svahnström
CHARLES D’ORLEANS
Ballade no 48
"Le dieu d'Amour est coutumier
A ce jour de fête tenir,
Pour amoureux coeurs fêter
Qui désirent de le servir;
Pour ce fait les arbres couvrir
De Fleurs et les champs verts gai,
Pour fêter la plus belle embellir,
Ce premier jour de mai"
……………………………………………………………………
JEAN-BAPTISTE CLÉMENT
Le mois de Mai , à contre courant du muguet et du soleil retrouvé , m'a évoqué la fin tragique de la Commune de Paris et le texte de Jean Baptiste Clément écrit pendant la répression en Mai 1871 au cours de la semaine sanglante pendant laquelle 20000 communards ont trouvé la mort.
Sauf des mouchards et des gendarmes,
On ne voit plus par les chemins,
Que des vieillards tristes en larmes,
Des veuves et des orphelins.
Paris suinte la misère,
Les heureux mêmes sont tremblants.
La mode est aux conseils de guerre,
Et les pavés sont tout sanglants.
Refrain
Oui mais !
Ça branle dans le manche,
Les mauvais jours finiront.
Et gare ! à la revanche
Quand tous les pauvres s’y mettront.
Quand tous les pauvres s’y mettront.
Les journaux de l'ex-préfecture
Les flibustiers, les gens tarés,
Les parvenus par l'aventure,
Les complaisants, les décorés
Gens de Bourse et de coin de rues,
Amants de filles au rebut,
Grouillent comme un tas de verrues,
Sur les cadavres des vaincus.
Refrain
On traque, on enchaîne, on fusille
Tous ceux qu’on ramasse au hasard.
La mère à côté de sa fille,
L'enfant dans les bras du vieillard.
Les châtiments du drapeau rouge
Sont remplacés par la terreur
De tous les chenapans de bouges,
Valets de rois et d'empereurs.
Refrain
Nous voilà rendus aux jésuites
Aux Mac-Mahon, aux Dupanloup.
Il va pleuvoir des eaux bénites,
Les troncs vont faire un argent fou.
Dès demain, en réjouissance
Et Saint-Eustache et l’Opéra
Vont se refaire concurrence,
Et le bagne se peuplera.
Refrain
Demain les manons, les lorettes
Et les dames des beaux faubourgs
Porteront sur leurs collerettes
Des chassepots et des tambours
On mettra tout au tricolore,
Les plats du jour et les rubans,
Pendant que le héros Pandore
Fera fusiller nos enfants.
Refrain
Demain les gens de la police
Refleuriront sur le trottoir,
Fiers de leurs états de service,
Et le pistolet en sautoir.
Sans pain, sans travail et sans armes,
Nous allons être gouvernés
Par des mouchards et des gendarmes,
Des sabre-peuple et des curés.
Refrain
Le peuple au collier de misère
Sera-t-il donc toujours rivé ?
Jusques à quand les gens de guerre
Tiendront-ils le haut du pavé ?
Jusques à quand la Sainte Clique
Nous croira-t-elle un vil bétail ?
À quand enfin la République
De la Justice et du Travail ?
………………………………………………….
DIDIER METENIER
oh mahé !!!
ce gazouillis
ce beau muguet
toutes et tous
en conviendrez
quel joli mois
ce mois de mai !!!
pour lui
pour elle
pour toi
pour moi
ce mois d'émois
où tout revit
et tout s'accroît
de plus longs jours
des nuits plus douces
temps pour mi-nous
cieux lumineux
bénis des dieux
cent mi-nous lieux
de rendez-vous
cent mi-nous lieux
pour me-nous-you
En anglais :
me - moi
you - toi
En occitan :
oh … mahé !!! – pour sûr...et ce n'est rien de le dire !!!
(exclamation d'usage fréquent propre à traduire une forte approbation)
P.S.:
Je dédie ce poème à Mahé né le 15 août 2020 en Australie, ainsi qu'à Yolande, son arrière grand-mère pour qui ce prénom restera à jamais indissociable de cette tendre formulation, si particulière, usitée à tout bout de champ par les locuteurs occitans de son entourage proche dans son petit village des Pyrénées centrales: « Oh ! Mahé ! ».
Une expression susceptible de ponctuer n'importe quel discours et digne équivalent d'un « peuchère !!! » marseillais et de bien d'autres formulations locales.
…………………………………
ALFRED DE MUSSET
La Nuit de Mai
Poète, prends ton luth et me donne un baiser ;
La fleur de l’églantier sent ses bourgeons éclore.
Le printemps naît ce soir ; les vents vont s’embraser,
Et la bergeronnette, en attendant l’aurore,
Aux premiers buissons verts commence à se poser.
Poète, prends ton luth et me donne un baiser.
LE POÈTE.
Comme il fait noir dans la vallée !
J’ai cru qu’une forme voilée
Flottait là-bas sur la forêt.
Elle sortait de la prairie ;
Son pied rasait l’herbe fleurie ;
C’est une étrange rêverie ;
Elle s’efface et disparaît.
LA MUSE.
Poète, prends ton luth ; la nuit, sur la pelouse,
Balance le zéphyr dans son voile odorant.
La rose, vierge encor, se referme jalouse
Sur le frelon nacré qu’elle enivre en mourant.
Écoute ! tout se tait ; songe à ta bien-aimée.
Ce soir, sous les tilleuls, à la sombre ramée
Le rayon du couchant laisse un adieu plus doux.
Ce soir, tout va fleurir : l’immortelle nature
Se remplit de parfums, d’amour et de murmure,
Comme le lit joyeux de deux jeunes époux.
LE POÈTE.
Pourquoi mon coeur bat-il si vite ?
Qu’ai-je donc en moi qui s’agite
Dont je me sens épouvanté ?
Ne frappe-t-on pas à ma porte ?
Pourquoi ma lampe à demi morte
M’éblouit-elle de clarté ?
Dieu puissant ! tout mon corps frissonne.
Qui vient ? qui m’appelle ? Personne.
Je suis seul ; c’est l’heure qui sonne ;
Ô solitude ! ô pauvreté !
LA MUSE.
Poète, prends ton luth ; le vin de la jeunesse
Fermente cette nuit dans les veines de Dieu.
Mon sein est inquiet ; la volupté l’oppresse,
Et les vents altérés m’ont mis la lèvre en feu.
Ô paresseux enfant ! regarde, je suis belle.
Notre premier baiser, ne t’en souviens-tu pas,
Quand je te vis si pâle au toucher de mon aile,
Et que, les yeux en pleurs, tu tombas dans mes bras ?
Ah ! je t’ai consolé d’une amère souffrance !
Hélas ! bien jeune encor, tu te mourais d’amour.
Console-moi ce soir, je me meurs d’espérance ;
J’ai besoin de prier pour vivre jusqu’au jour.
LE POÈTE
Est-ce toi dont la voix m’appelle,
Ô ma pauvre Muse ! est-ce toi ?
Ô ma fleur ! ô mon immortelle !
Seul être pudique et fidèle
Où vive encor l’amour de moi !
Oui, te voilà, c’est toi, ma blonde,
C’est toi, ma maîtresse et ma soeur !
Et je sens, dans la nuit profonde,
De ta robe d’or qui m’inonde
Les rayons glisser dans mon coeur.
...
Les plus désespérés sont les chants les plus beaux,
Et j’en sais d’immortels qui sont de purs sanglots.
……………………………………….
CLAUDE NOUGARO
Paris Mai
Mai, mai, mai, Paris mai
Mai, mai, mai Paris
Mai, mai, mai, Paris mai
Mai, mai, mai Paris
Mai, mai, mai, Paris mai
Mai, mai, mai Paris
Le casque des pavés ne bouge plus d'un cil
La Seine de nouveau ruisselle d'eau bénite
Le vent a dispersé les cendres de Bendit
Et chacun est rentré chez son automobile
J'ai retrouvé mon pas sur le glabre bitume
Mon pas d'oiseau-forçat, enchaîné à sa plume
Et piochant l'évasion d'un rossignol titan
Capable d'assurer le Sacre du Printemps
Mai, mai, mai, Paris mai
Mai, mai, mai Paris
Ces temps-ci, je l'avoue, j'ai la gorge un peu âcre
Le Sacre du Printemps sonne comme un massacre
Mais chaque jour qui vient embellira mon cri
Il se peut que je couve un Igor Stravinsky
Mai, mai, mai, Paris mai
Mai, mai, mai Paris
Mai, mai, mai, Paris mai
Mai, mai, mai Paris
Et je te prends Paris dans mes bras pleins de zèle
Sur ma poitrine je presse tes pierreries
Je dépose l'aurore sur tes Tuileries
Comme roses sur le lit d'une demoiselle
Je survole à midi tes six millions de types
Ta vie à ras le bol me file au ras des tripes
J'avale tes quartiers aux couleurs de pigeon
Intelligence blanche et grise religion
Mai, mai, mai, Paris mai
Mai, mai, mai Paris
Je repère en passant Hugo dans la Sorbonne
Et l'odeur d'eau-de-vie de la vieille bombonne
Aux lisières du soir, mi-manne, mi-mendiant
Je plonge vers un pont où penche un étudiant
Mai, mai, mai, Paris mai
Mai, mai, mai Paris
Mai
Paris
Le jeune homme harassé déchirait ses cheveux
Le jeune homme hérissé arrachait sa chemise
"Camarade, ma peau est-elle encore de mise"
"Et dedans mon cœur seul ne fait-il pas vieux jeu"
"Avec ma belle amie quand nous dansons ensemble"
"Est-ce nous qui dansons ou la terre qui tremble"
"Je ne veux plus cracher dans la gueule à papa"
"Je voudrais savoir si l'homme a raison ou pas"
"Si je dois endosser cette guérite étroite"
"Avec sa manche gauche, avec sa manche droite"
"Ses pâles oraisons, ses hymnes cramoisis"
"Sa passion du futur, sa chronique amnésie"
Mai, mai, mai, Paris mai
Mai, mai, mai Paris
Mai
Paris
C'est ainsi que parlait sans un mot ce jeune homme
Entre le fleuve ancien et le fleuve nouveau
Où les hommes noyés nagent dans leurs autos
C'est ainsi, sans un mot, que parlait ce jeune homme
Et moi l'oiseau-forçat, casseur d'amère croûte
Vers mon ciel du dedans j'ai replongé ma route
Le long tunnel grondant sur le dos de ses murs
Aspiré tout au bout par un goulot d'azur
Là-bas brillent la paix, la rencontre des pôles
Et l'épée du printemps qui sacre notre épaule
Gazouillez les pinsons à soulever le jour
Et nous autres grinçons, pont-levis de l'amour.
……………………………..
LOUISA PAULIN
|
LOÏSA PAULIN |
……………………………………………………………
JEAN-PIERRE SIMÉON
A L’IMPOSSIBLE ON EST TENU
Oui je sais que
La réalité a des dents
Pour mordre
Que s’il gèle il fait froid
Et que un et un font deux
Je sais je sais
Qu’une main levée
N’arrête pas le vent
Et qu’on ne désarme pas
D’un sourire
L’homme de guerre
Mais je continuerai à croire
A tout ce que j’ai aimé
A chérir l’impossible
Buvant à la coupe du poème
Une lumière sans preuves
Car il faut être très jeune
Avoir choisi un songe
Et s’y tenir
Comme à sa fleur tient la tige
Contre toute raison
Poème extrait de Ici , 2009
………………………………..
JEAN-MICHEL TARTAYRE
ESQISSES DE MAI
1
C’est perdu dans un ouest lointain
La même sourdine
Où filtre un désert de pierres ocreuses
La peau devenue cuivre,
Le vent sec et le sable
Les yeux fermés, sur sa monture-
On avance
Une cavalcade sans chemin
Qu’une gourde au ceinturon
in Vers l'été, suivi de Fractions du Jour, 2016
……………………………………………….
SVANTE SVAHNSTRÖM
MAJ (écrit en "universification", cf explications sous "Qui fait cela?")
Pirmasis maj tnejn tisoč keturi
Europa olema um baliček lahja
Ar pompa sich desfazer suo nudo
Spárga piir poistaa
Kado sin yksi stôl mise par fich fênnef naród
Rücken open towards estepa
voet vo fire farraige
Közt kilometer lontano ké square
sopra štyri sto fifty ekatommirio stol
kuzyn enono tistenna
genitori z krzepki constituição
Ementa van volonté
Le premier mai deux mille quatre
l’Europe est un paquet cadeau
Avec pompe se défont ses nœuds
Ficelles frontières enlevées
le cadeau est une table mise pour vingt cinq nations
dos ouvert aux steppes
les pieds dans quatre mers
Entre kilomètres distants et carrés
sur quatre cent cinquante millions de sièges
les cousins unis attendent
parents de robuste constitution
Le menu est volonté
Traduit de :
Lituanien – danois – maltais – slovène – lituanien
… - estonien – portugais – tchèque - finnois
Letton – suédois - allemand – portugais - italien – espagnol
Hongrois - estonien - Finnois
Néerlandais – luxembourgeois – finnois - slovaque – français – letton – gaélique – luxembourgeois – polonais
Allemand – flamand – anglais – espagnol
Néerlandais – tchèque – danois - gaélique
Hongrois – suédois – italien – grec - anglais
Italien – slovaque - slovène – anglais – grec – suédois
Polonais – grec – maltais
Italien – tchèque – polonais - portugais
Portugais – hongrois – français
Inédit, 2004