samedi 2 mai 2020

Une pincée d'Occitanie


Château de Penne - Tarn-et-Garonne



Auteurs
                                            
                                           Sabine Aussenac  14 mai 2020
                                                Franc Bardou 14 mai 2020, 23 octobre 2020
                                                Monique-Lise Cohen  9 avril 2020
                                               
Didier Metenier 11 juin 2020
                                                Francis Pornon  23 octobre 2020
                                                Svante Svahnström  14 mai 2020
                                             


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FRANCIS PORNON

 

Après-midi

Axe équidistant entre les lourdes nuits
Où s'écartent les hémisphères du jour
Temps sacré de la sieste
Séjour d'ombre quand se déchaîne la rage du soleil
Temps dérobé
Où expirent bavardages et obséquiosité
Temps où les villes cessent leur racolage
Où l'on se retrouve nu
Le lac perd so voile métallique
Garonne exhibe l'aine de ses ponts
L'eau dans sa peau frémissante outremer féminine
Expose ses îles et ses rives
Où pataugent des oiseaux impudiques
Promesses de hauts-fonds secrets

Ou d’estuaires ultramarins 

 

Extrait de Midi, in Par-delà le grand fleuve 2011    

 

 

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 Traduction : FRANC BARDOU

 

Après-miègjorn

Ais eqüidistant entre las nuèits pesugas
Ont s’escartan los emisfèris del jorn
Temps sacrat del penequet
Sojorn d'ombra quand se descadena la raja del solelh
Temps raubat
Ont viran l'uèlh barjadisses e obsequiosetat
Temps que las ciutats i quitan de racolar
Ont nos retrobam nud
Lo lac se pèrd lo vel metallic
Garona exibís l'engue dels ponts sieus
L’aiga dins sa pèl fremissenta oltramar feminina
Expausa sas islas e sas rivas
Ont margolhan d'aucèls impudics
Promessas d'auts-fonses secrets
O d'estuaris ultramarins 

 

Extrait de Mègjorn, in Per-enlà lo flume grand – 2011

Traduccion amistosa a l’occitan de

Franc Bardòu



DIDIER METENIER


 

ô Toulouse...

terre d'accueil

terre d'exil

terre du con

final !!!

ô toulousains...

où que vous soyez

présentement con

finés...

et nous le sommes tous !!!

ô toulousains...

d'où que vous soyez

d'ici ou de là-bas...

toulousains du transfert

toulousains en transit

toulousains de Paris

de New York ou d'ailleurs...

toulousains par naissance

toulousains d'attirance

toulousains d'adoption

ou toulousains de cœur...

avec ou sans

par trans-continement

l'apaisante présence

de l'amie de toujours

toi Garonne Océane

notre Etoile de Mère

toi qui nous manques tant...

 

fichu temps que ce temps

du grand con

finement con !!!

 

je nous sens à présent

(comme tout con

finé)

aussi cons

in fine

mais plus que jamais

toulousains con !

 

En latin :

in fine (prononcer « in finé ») - au final



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SABINE AUSSENAC

Et Toulouse est amour... 

Quand les rues où miroite un airbus en écho

Batifolent en rugby ou éclatent de joie,

Le Capitole chante, un ténor aux cent voix,

Pour ces siècles mémoire aux images joyaux.

 

Les briques déployées nous empourprent de vie

Et Garonne se pâme, femme belle et joyeuse,

Comme un sillon fertile vers des vallées heureuses.

Au Canal enjoué la mer nous éblouit,

 

Alliée au soleil des langueurs océanes,

Ses platanes en une arche déployée comme une âme.

Saint-Sernin en boussole des passés éternels


Accueille les couchants en corail de lumière,

Et Toulouse jubile et Toulouse est si fière

Et Toulouse est amour, liberté et appel.

.........

Je me souviens souvent du granit du Sidobre


Je me souviens souvent du granit du Sidobre,
Des sentes oubliées comme un soleil d’octobre.
Comme au matin du monde les rochers s’élevaient,
Beaux géants tutélaires, immobiles guerriers.

Nous ouvrons les fougères comme on peigne une femme,
En marchant sur des mousses aux murmures secrets.
La source, serpentine, un grelot à nos âmes,
Toute ourlée de cresson, en attente de fées.

Tous ces noms aux symboles, Roc de l’Oie qui étonne,
Trois Fromages empilés par les siècles amusés,
Et puis le Lac du Merle aux fraîcheurs empesées :

Nous foulons en silence le Chaos qui résonne…
Je reviendrai bientôt, Autanette rêveuse,
Vers la Quille du Roy qui me rendait heureuse.


.........

Soudain, les cigales


Soudain, les cigales.

La route de la mer serpentait vers les bleus.

Cézanne, ouvre-toi !

Garrigue frissonnait en femme amoureuse,

thyms et serpolets guidaient

vers les isthmes.

Mare nostrum. Phocéenne, grecque, andalouse :

ma Méditerranée

un delta du monde.

 

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FRANC BARDOU


Occitania      

 

Comba entre quatre carns de flamba inamorçabla, 

Tant de temps dins l’escur de las albas sense anma 

Te cerquèri, perdut, alas sense uèlhs d’aucèl, 

Tant de temps escampat coma al cèl l’estelada, 

Cristalizat d’esglai cara a l’immensitat 

D’unes devenirs derisòris. 

Comba de solitud esclairada d’aucèls, 

D’uèlhs al cèl, a l’estrada, 

Cadun s’i sap sense cap nom ni començar, 

Cadun s'i sap perdon, mas a pro pena obèrts, 

Los pòts te vòlon dire, a pro pena se pèrd, 

Quatre rius de lagremas, quatre rebats d’orguèlh 

Per quatre enterraments, desalenats d’alada 

E mòrt a ta memòria.

 

Extrait de Nocturnal d’errança (2017, Tròba Vox)

 

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Occitanie

 

Combe entre quatre chairs de flamme inextinguible, 

Tant de temps dans le noir des aubes inanimées 

T’ai-je cherchée, perdu, ailes sans yeux d’oiseau, 

Tant de temps répandu comme au ciel les étoiles, 

Cristallisé d’effroi face à l’immensité 

De destinées si dérisoires. 

Combe de solitude que les oiseaux éclairent, 

Regards au ciel, cherchant les signes, 

Chacun s’y sait sans nom, sans mot, sans origine, 

Chacun s’y sait pardon, mais juste à peine ouverte 

La bouche veut te dire, aussitôt se perd-elle, 

Quatre fleuves de larmes, quatre reflets d’orgueil 

Pour quatre enterrements, souffle coupé de vol 

Et mort à ta mémoire.

 

Extrait de Cahier nocturne d’errance (2017-Tròba Vox





MONIQUE-LISE COHEN


Le secret hébraïque du nom de Toulouse :
La vallée des 15 amandiers

Toulouse, ville du sauvetage

Elle s’élève
des racines d’un sol transversal
elle s’éveille au bleu
plus chaud que le rose
l’espérance vient sur ses lèvres
à son flanc sourit une nacre
d’aubépine
elle vient du soleil
et éclaire les instants
elle a frayé la voie du sauvetage
en elle les montagnes s’abolissent
et les frontières livrent leurs secrets
Elle a compulsé les temps
et les vents
elle s’inscrit dans la vision du livre
des yeux se peignent
à l’allumage des couleurs
Sauver ouvre la voie des résurrections
Elle indique notre vie
dans les chemins de la survie
Car toute vie vient de Dieu
(elle prend ses racines dans le ciel)
Elle n’est pas naturelle
Elle prend son essor dans des lumières oublieuses
Elle a largement puisé aux sources des romans invincibles
Nous sommes les obligés
pour une science des conformités
Elle s’assagit au détour de la rivière
Elle monte paisible sur nos fronts éblouis
Elle a choisi ses enfants pour dorer une mémoire
Elle s’abreuve au-delà des miséricordes
La survie se dévoile en sa paix

La vallée des 15 amandiers
(source hébraïque et secrète de son nom)


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SVANTE SVAHNSTRÖM

TOLOSENC

 

Quelques instants hors du rose

Cinq mois après la mue

ce plaisir de sentir à nouveau ton ventre tendu

contre mes plantes

Ah Paris !

Avant je flottais un peu

sous ta peau XL bien large pour moi 

me perdais parfois entre

quelques parts de ton corps

Ta peau je l’ai troquée maintenant

pour une cape moins large

Taille quatre seulement certes

C’est à une vie un brin rétrécie qu’elle invite

mais tellement moelleuse

Je me love dans ses valeurs

leialtat fiseltat et paratge

et me sens quasiment troubadour

loyal et fidèle chevalier noble de cœur

Je m’imprègne

 

Comme pendant les quarante ans

sous-cutanées en toi

rien n’y manque tout y est

Du côté des saints c’est 

du gothique du roman 

du romain du romantique 

Etienne Raymond Ursule et Sernin

Des façades se froissent en géométries ornementées

ponctuées de postures humaines minérales

Points d’exclamations muraux

Sous la terre des rails

où s’ouvre une tanière illuminée

à chaque estaciou benento

Sous le ciel des rails

échappés du Palais de Justice

des lignes de fuite

en cavale vers les pistes où décollent les ailes en métal

Les faux pas cruels de l’Histoire

se nichent encore intacts dans la mémoire

de cette terre qui n’oublie pas

la geste héroïque d’icônes de droiture

Un filet frais permanent dévale sa poitrine

comme les deux qui rincent ses omoplates

Garonne Midi Brienne

 

Je consomme de tout comme sous ton derme

et palpe la poésie dans sa caverne du Taur

Ah Toulouse !

Quel bonheur cette nouvelle peau sur mes épaules

Quand elle me serre les bras

je vois la ville en rose

Sous les yeux de la Belle Paule et Dame Tholose

j’adhère à la brique

Quel délice mon ancien habitacle

de te frôler quelques instants une fois encore

Mais je retiens ici la coubibencio

Dans ma nouvelle vie c’est par « Merci, au revoir »

à la descente de l’autobus

que nous prenons congé du machiniste

et après mon « Merci » 

c’est « Avec plaisir »

que concluent les lèvres derrière le comptoir

avec un accent de cailloux qui roulent en torrent

Néanmoins longeant les rues du  Païs d’Oc  

des gens qui parlent patés

c’est surtout francimandeja

ces résonances du nord de la Loire

que j’entends au Pays d’Oc

 

Sous cette peau plus menue

mes efforts sont moindres pour m’en aller onduler

avec les câlins des courbes occitanes

Déployer ses bras suffirait à la ciutat

pour tremper les doigts dans deux eaux salées

Anglet pour l’annulaire

Argelès pour l’autre auriculaire

Une puce me prendrait sur ses épaules

deux sauts me suffiraient

pour dominer le Pic du Géant

qu’assaillent en escalade les sardanes

secouant sous leurs rebonds.

le torse de l’Espagne

Je mue comme je l’ai dit

En lenteur

Dans le sillage de la cité première

où les Volques prospéraient

à la numéro quatre de la République

je m’immerge en suave glissade

afin de bientôt me voir

bientôt me dire

entier Tolosenc

 

Novembre 2017, avec un clin d’œil respectueux aux grands Edith et Claude


Leialtat - loyauté

Fiseltat - fidélité

Paratge - noblesse de cœur

Saint Etienne – cathédrale gothique de Toulouse

Saint Raymond – musée des Antiques romaines de Toulouse

Sainte Ursule – rue pittoresque du centre historique

Saint Sernin – basilique romane

Estaciou benento – prononciation occitane d’« estacion venenta » :  « Prochaine station »

3 cours d’eau :

Garonne- le fleuve qui traverse Toulouse

Midi(du) et Brienne(de) – canaux traversant Toulouse

La Cave Poésie est située rue du Taur

La Belle Paule – peinture dans la Salle des Illustres du Capitole représentant Paule de Viguierie, qui en raison de sa beauté aurait été nommée ainsi à l’âge de 15 ans par François Ier

Dame Tholose – statue au sommet de la colonne place Dupuy, représentant la renommée

Coubibencio – prononciation occitane de « convivencia » : convivialité

Patés – dénomination en occitan du parler local

Francimandeja – en occitan, parler le français du nord de la Loire, s’écrit « francimandejar »

Sardane – une danse traditionnelle catalane

Volques – les Volques Tectosages étaient les premiers habitants de Toulouse

Ciutat - cité, ville, ville forte

Tolosenc – Toulousain en occitan

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